Contexte contemporain
Transposée en contexte contemporain, la notion d’interdépendance des phénomènes
amène parfois certains bouddhistes à affirmer que leur conception du monde anticipe
les découvertes scientifiques. Les meilleurs interprètes restent pourtant à cet
égard tout à fait conscients de l’écart qui existe entre les approches bouddhique
et scientifique, et ne cherchent d’aucune façon à les confondre ou à les superposer.
Il est vrai que ni le bouddhisme ni la science ne présupposent la croyance en un
Dieu créateur. Dans aucune de ces deux approches, on ne postule de principe premier
qui servirait d’explication universelle. Dans le cas des bouddhistes, l’affirmation
que les phénomènes (physiques et psychiques) s’enchaînent les uns aux autres en
complète interdépendance vient d’une intense expérience de méditation, tandis que,
dans le cas de la science, des conclusions similaires proviennent entre autres d’investigations
en laboratoire. Les bouddhistes conscients de ces différences insistent sur le fait
qu’au moyen de méthodes de recherche radicalement opposées, chacune valide en son
domaine respectif, on puisse arriver à une convergence de point de vue. Ce refus
d’un concordisme hâtif et l’accent mis sur la spécificité de chacun des domaines
me semblent une voie d’avenir pour le nécessaire dialogue qui doit s’instaurer entre
bouddhisme et science (je m’inspire ici des analyses de Trinh Xuan Thuan et de Mathieu
Ricard).