Les religions amérindiennes
Il n’y a pas une, mais des façons pour les Amérindiens de se représenter le monde
qui les entoure, et ces façons varient avec chacune de ces nations autochtones.
Le monde dont il est question ici, c’est d’abord l’habitat propre à chaque nation
: la forêt, la plaine, les lacs, les montagnes où ils sont appelés à vivre, avec
tous les voisins humains, animaux, végétaux, tantôt amicaux, tantôt menaçants. Ce
monde comprend également une zone éloignée, plus ou moins invisible, constituée
entre autres du soleil, de la lune, des constellations, autant de puissances qui
contrôlent mystérieusement l’incontrôlable.
Mythes et légendes mettent en scène la gestation d’un monde diversifié. Dans une
société à filiation traditionnellement matrilinéaire comme celle des Hurons-Wendats,
c’est une vénérable grand-mère, une certaine Aataentsic, qui préside à l’ordonnancement
du monde. Pour des raisons variables, on raconte qu’elle aurait chuté de son grand
domaine céleste où elle vivait une vie paisible, et se serait retrouvée dans les
eaux qui recouvraient jadis la terre et auraient pu l’engloutir. Heureusement, de
grands oiseaux blancs avaient secouru la dame. Sur le conseil de tous, un des animaux
éparpilla sur la carapace de Grande Tortue quelques mottes remontées du fond des
eaux. Ainsi fut formée l’île qui devint la terre habitable où Aataentsic put s’installer.
Pour éclairer la terre, Petite Tortue, un animal différent de Grande Tortue, grimpa
dans le ciel, y recueillit des éclairs et fabriqua ainsi un grand feu qu’elle suspendit
dans le ciel. Elle creusa également au bout de l’île un long tunnel par où le Soleil
pouvait disparaître à l’ouest et revenir le matin à l’est, tandis que la Lune, qui
allait devenir l’épouse du Soleil, remplacerait celui-ci pendant la période d’obscurité.
Plus tard, Aataentsic donna naissance à une fille qui, elle-même, accoucha de jumeaux.
L’un reçut le nom de Iouskeha, et c’est lui, dit-on, qui eut l’idée de doter la
terre d’une multitude de rivières et de lacs, de forêts splendides, d’érables à
sève sucrée, de juteuses citrouilles, de framboises et bleuets charnus. Malheureusement,
Tawiscaron, le frère de Iouskeha, s’ingéniait en même temps à ravager tout ce qu’il
apercevait de prodigieux autour de lui. On dit que c’est lui qui inventa les épidémies
et la mort. Le monde de tous les jours est en fait le fruit d’incessantes querelles
entre ces deux frères : c’est pourquoi il est à la fois merveilleuses séductions
et maux imprévisibles. Impossible harmonie que les Wendats acceptent avec un certain
pragmatisme, en combinant les fêtes somptueuses et les actions rituelles préventives.